mardi 8 avril 2014

L'Iran, l'atlantisme, et « les miettes »

En octobre 2013, Le Figaro s'émut que les entreprises françaises soient les grandes perdantes de la course au marché iranien face aux entreprises américaines. Une information confirmée depuis par Le Canard enchaîné.

En effet, en prévision de l'assouplissement des sanctions économiques internationales sur le nucléaire iranien, l'Iran apparaît comme un marché émergent de 80 millions d'individus. Un marché que les groupes automobiles français PSA et Renault dominaient... jusqu'en 2011 et le début de l'embargo. Son assouplissement, couplé à l'Executive Order Act 13645 signé le 3 juin par le président Barack Obama (qui vise indirectement les entreprises françaises) ouvre un boulevard aux entreprises américaines telles que General Motors.
«Nous avons pourtant joué le jeu des sanctions américaines contre l'Iran ces dernières années», [se plaint] un diplomate au Quai d'Orsay. Paris est même allé parfois au-delà des exigences de Washington, comme le souligna un télégramme diplomatique de l'ambassade des États-Unis à Paris révélé par WikiLeaks et intitulé «La France à la pointe du glaive» contre l'Iran.
(Je passe sur la légère contradiction du quotidien de Dassault dans son utilisation d'informations volées de WikiLeaks après s'être insurgé de la publication d'informations volées sur les turpitudes de son propriétaire).

Ces conséquences prévisibles, s'inscrivent dans « une mue diplomatique entamée sous la présidence de François Mitterrand », subordonnant la France à l'agenda de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN) et de l'Union européenne (UE), explique Anne-Cécile Robert dans l'édition d'avril du Monde diplomatique

Sous la présidence de François Hollande, la diplomatie française se fait plus atlantiste et belliqueuse... que la diplomatie américaine ! 

En effet, en plus des interventions militaires au Mali et en RDC, c'est la France qui a le plus ardemment soutenu les frappes « punitives » contre Damas (avec pour conséquence une cinglante débâcle diplomatique), c'est la France qui a tenté par tous les moyens de saboter l'accord intérimaire sur le nucléaire iranien, et qui est en première ligne dans l'obsession antirusse au cœur de la crise ukrainienne. La diplomatie française semble naviguer à vue, dans l'improvisation la plus totale.

Comment s'étonner que les Etats-Unis tondent littéralement un tel allié, agissant comme un aveugle particulièrement naïf ?
«Les Français devraient se rendre compte qu'en cas d'accord entre nous et les Amé­ricains, leurs entreprises ne récolteront que des ­miettes», sourit un ­diplomate iranien.
 Des miettes particulièrement chères payées. 


Jérémie Fabre

Sources utilisées :

• Georges Malbrunot, « En Iran, l'offensive discrète des entreprises américaines », Le Figaro, 4 octobre 2013.

• Alain Guédé, « Obama chasse le lion Peugeot chez les mollahs », Le Canard enchaîné, 30 octobre 2013.

• Julie Morel, « Exercice : Que trouve-t-on dans le panier d’achat de Serge Dassault ? », Acrimed, 26 septembre 2013.

• Anne-Cécile Robert, « Plus atlantiste que moi... », Le Monde diplomatique, avril 2014.

• Olivier Zajec, « Cinglante débâcle de la diplomatie française », Le Monde diplomatique, octobre 2013.

• Serge Halimi, « Iran, le dégel », Le Monde diplomatique, décembre 2013.

• Olivier Zajec, « L’obsession antirusse », Le Monde diplomatique, avril 2014.

• Claude Angeli, « L'Ukraine et les deux autres raisons de ménager Poutine », Le Canard enchaîné, 26 février 2014.

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